Time.. Photo Darren Tunnicliff |
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Lectures: | Ecclésiaste 3,1-11 Galates 4,1-7 |
Chers Amis,
En ce début d'année,
j'aimerais vous proposer une réflexion à la fois légère
et insaisissable, puisqu’elle porte sur le temps qui passe…
Or donc, une année de
plus… avec tous les bons vœux, les confettis et les
résolutions : allons voir si on les tiendra mieux que
l'an précédent!
Le temps… une donnée
à la fois si simple et en même temps le reflet de notre
inquiétude la plus profonde : il est d'une certaine manière
la mesure du sens et du non-sens de nos existences. On prend du
temps… on en gagne… et surtout : on en perd!
Je dis surtout, parce que je
crois que c'est l'angoisse majeure de l'homme occidental: perdre du
temps! Ne pas être efficace, ne pas être productif,
ne pas être utile. C'est là une caractéristique
de notre culture, que nous ne partageons pas avec d'autres traditions
qui sont moins critiques vis-à-vis d'une certaine nonchalance.
Si la relation au temps change
d'une culture à l'autre, une chose reste constante : la
conscience que notre temps individuel est limité. La vie a un
commencement. Elle a aussi une fin. C'est pour cela que la question
du temps est littéralement une question de vie ou de mort.
Cela explique peut-être
aussi les efforts constants des sociétés pour gagner
une certaine maîtrise du temps, ne serait-ce qu'en le mesurant,
en l’organisant et en le structurant.
C'est aussi une affaire de
pouvoir. La structuration du temps en jours de travail et jours de
repos, sans oublier les jours réservés pour les fêtes
et de solennités : c'est une affaire politique, même
si elle a souvent aussi une dimension religieuse.
On peut sourire des disputes
historiques au sujet du calendrier, entre le système julien et
le système grégorien. Il reste que ces disputes avaient
des enjeux politiques et économiques importants, tout comme
aujourd'hui les discussions sur le dimanche ou sur les heures de
travail.
On sait que ces discussions
sont l’un des points où les intérêts
économiques se confrontent avec les intérêts des
individus, à commencer par la question de leur bien-être.
Mais qu’est-ce que le bien-être? D’avoir des
moyens? D’avoir du temps? De se sentir important
(peut-être justement par le fait d’être très
occupé, de n’avoir jamais de temps!)?
Avouons que sur point, nous sommes souvent en pleine contradiction!
Et ce d’autant plus
qu’avec la modernité, on est entré dans un
contrôle très précis du temps. Le temps de
travail est aujourd'hui compté à la minute, voir à
la seconde près.
Mais cela va plus loin encore. On
prend aujourd'hui modèle sur les ordinateurs pour se laisser
dicter son propre comportement.
L'ordinateur est basé
sur un processeur qui exécute des instructions l'une après
l'autre. En informatique, un concept de base est celui de
l'interruption. Imaginons l'ordinateur en train de faire un calcul,
et voici que l'utilisateur clique la souris. Cet événement
conduit le processeur à suspendre son travail, à
s'occuper de cette interruption, puis à reprendre sa tâche
précédente exactement là où il l’avait
laissée. Un processeur peut faire cela des milliers de fois
par seconde. Une interruption peut elle-même être
interrompue, quand survient un événement d’un
niveau de priorité plus grand. Et ainsi de suite en cascade.
L'ordinateur a cette extraordinaire faculté de revenir
systématiquement là où il en était, une
fois l'interruption traitée.
La tentation est grande
d'imaginer que nous pouvons fonctionner de la même façon.
Pendant que j'écris ce texte, voici que le
téléphone sonne. Je réponds. Tout en parlant au
téléphone, je m'aperçois qu'un message est
arrivé. Je le lis … et ainsi de suite.
Sauf qu’occupé par
la lecture du message, je manque une phrase de mon interlocuteur. Je
dois le faire répéter. Et quand j'ai reposé mon
combiné, je reviens au message que je n’avais pas fini
de lire… puis je passe à un autre, et j’ai déjà
presque oublié ce que j’étais en train de faire
au début. Ah oui, écrire ce texte!
Petit à petit, nos
cerveaux se programment à essayer d’imiter les
ordinateurs, à vivre avec ces constantes interruptions. Nous
gagnons la faculté de faire dix choses à la fois. Mais
nous perdons celle de vraiment nous concentrer. Nous nous énervons,
nous nous fatiguons. C’est une réalité, nous ne
sommes pas des machines. Heureusement! Notre intelligence créative
ne suit pas une logique de séquence. Elle associe des idées
et des émotions d’une manière complètement
différente. Ca part dans tous les sens, mais quand les
conditions sont remplies, ça marche, les idées
arrivent, les mots, les couleurs, les sons, tout prend sens!
Nous ne sommes pas des ordinateurs, nous sommes tellement mieux!
* * *
Il y a un temps pour tout,
nous dit l'Ecclésiaste. Et quand il dit un temps, il ne dit
pas dix secondes! Il dit un vrai temps!
Un temps pour rire, et un temps pour
pleurer.
Chaque temps est différent
de celui qui lui est opposé.
On ne peut pas être à la fois dans l’un et dans l’autre.
On ne peut pas être à la fois dans l’un et dans l’autre.
Le temps, on le reçoit.
On le reçoit, avec la nature qui lui est propre. Est-ce un
temps facile? Est-ce un passage délicat de l'existence?
Est-ce le temps d’aimer? Ou pas?
Je reçois les temps de
ma vie, mais il m'appartient de les interpréter. Il
m'appartient de les vivre pour ce qu'ils sont, dans le cadre du temps
qui m’est donné. Même si le sens ultime des choses
m'échappe, il m'appartient d'être vrai avec ce que je
vis aujourd'hui.
La pensée de
l'Ecclésiaste nous aide à nous remettre dans la
perspective d'un temps qui nous est donné, plutôt qu'un
temps dont nous pourrions disposer indifféremment. Chaque
temps à une nature particulière. Notre vie n'est pas
seulement un capital de secondes (86’400 par jour). Elle est un
don toujours renouvelé, et toujours différent.
La foi en Jésus-Christ
nous conduit plus loin. Comme le montre l'apôtre Paul, la venue
du fils de Dieu dans l'histoire humaine, à un moment précis
de cette histoire, cette venue change notre relation avec cette
histoire. Elle change notre relation avec le temps. Elle nous libère
de sa contingence.
En Jésus-Christ, nous
devenons fils de Dieu. Fils adoptif, certes, mais fils!
Dieu non seulement nous donne
les temps, avec ce qu'ils ont de merveilleux et de terrible : il nous
rend participants de son temps à
lui. Il fait de nouveau ses héritiers :
un jour, nous entrerons dans son temps, le temps de son Règne.
Ce que sera ce temps…
comment le comprendre?! Contentons-nous de savoir que nous y
serons libres de ce qui aujourd'hui encore nous tient captif !
Et surtout, vivons des
maintenant dans la perspective de cette liberté, à
laquelle nous pouvons déjà goûter aujourd'hui.
Libérons-nous du temps étouffant, du temps compté,
du time is money,
du je n'ai pas le temps.
En attendant le temps qui
n'aura pas de fin, goûtons les temps de notre vie,
recevons les toujours à nouveau!
recevons les toujours à nouveau!
Amen
Olivier
Schopfer
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