La chèvre de M. Seguin par Sugy |
La chèvre de M. Seguin par Sugy |
Prédication du 3 mai 2015, Berne
Lectures : | 1 Pierre 5,1-11 Jean 10,11-18 Le bon berger |
Chers Amis,
C'est une histoire
d’agneaux, de bergers, et bien sûr… de loup !
De loup, de bête sauvage, ou alors de lion, de tigre, ou même de tyrannosaure…
De loup, de bête sauvage, ou alors de lion, de tigre, ou même de tyrannosaure…
À la manière de la
chèvre de Monsieur Seguin, qui part trotter sur les cimes herbeuses,
ou de ces autres histoires de loup, qui peuplent peut-être votre
enfance. En tout cas la mienne !
Tous les personnages
sont réunis pour un drame effrayant, qui rejoint nos peurs les plus
inconscientes, mais qui en même temps nous rassure : comme nous
sommes bien ici, à l'abri dans cette église ! Pas de loup à
l'horizon, au contraire, une divine protection est sur nous.
L'enfant sur les
genoux de celui qui veut bien lui raconter pour la 20ème
fois l'histoire du loup, se réjouit d'avance d'avoir peur et d'être
rassuré !
Sauf que dans les
deux versions que nous avons entendues, celle de l'Évangile de Jean,
ou Jésus est le berger, et celle de la première épître de Pierre,
où ce sont les anciens,
les presbytres,
qui sont les bergers, le troupeau de
brebis, ce sont les croyants, c'est-à-dire nous !
Et le loup… ou le
lion …
Il n'est pas dans les bois ou sur les cimes, mais il rôde au milieu de nous !
Il y a donc quand même de quoi s’inquiéter…
Il n'est pas dans les bois ou sur les cimes, mais il rôde au milieu de nous !
Il y a donc quand même de quoi s’inquiéter…
Mais le problème,
ce n'est pas le loup ! C'est dans la nature des loups et des lions de
courir après les brebis et de les disperser !
Non, le problème
c'est le berger ! Le problème, ce n'est pas ce qui peut disperser
les croyants. Il y aura toujours des raisons de se disperser ! La
vraie question c'est : qu’est-ce qui nous tient ensemble ?
Dans l'Évangile de
Jean, Jésus aborde de cette question alors qu'il est en pleine
controverse avec les pharisiens. Les pharisiens se réclament de
Moïse. Ils prétendent être habilités à gérer l'héritage de
Moïse, c'est-à-dire à interpréter la volonté de Dieu, tels
qu'ils la comprennent. Ils prétendent pouvoir fonctionner comme
autorité morale devant le peuple.
Rien d'étonnant à
ce qu'ils soient fâchés, quand Jésus commence à dire que le bon
berger, qui prend bien soin du troupeau, c'est lui et pas eux !
Et il en rajoute, en
traitant les autres bergers de mercenaires, d'employés, qui font ça
pour leur salaire et pas par amour pour les brebis ! Et qui partent
en courant dès que l'ombre d'un loup s’approche !
Si j'étais
pharisien, je me sentirais visé! Et dans le fond, je suis un peu
leur successeur, comme brave fonctionnaire du bon Dieu !
Mais l'Évangile de
Jean n'a pas été écrit pour les pharisiens, il n’a pas été
écrit pour les pasteurs d’aujourd’hui, il a été écrit pour
une jeune église, dans laquelle la même question se pose :
qu'est-ce qui nous tient ensemble ?
Et pour les membres
de cette Église, la réponse de Jésus prend une couleur différente,
eux qui savent la suite de l'histoire, eux qui savent ce qui est
arrivé à Jésus après ! Dans la réponse de Jésus, ils
reconnaissent une annonce de sa passion: « Le
bon berger se dessaisit de sa vie pour ses brebis
».
Ce qui nous
rassemble ? C'est le Christ qui nous aime jusqu'à l'extrême ! C'est
le Christ vivant, malgré la mort, au-delà de la mort. C'est le
Christ vainqueur de la mort !
Et tant pis pour les
pharisiens et leur légalisme ! Eux voudraient tenir les gens
ensemble en leur disant ce qu’ils doivent faire ou ne pas faire !
Ce qui nous
rassemble, c’est d’avoir été aimés, alors aimons-nous, comme
le Christ nous a aimés, et tout ira bien !
Si c'était si simple, ça
se saurait !
Si c'était si
simple, il n'y aurait pas besoin de parler du loup (ou du lion), ni
de mauvais bergers, de mercenaires… et il n'y aurait pas besoin
d'autres bergers que le berger suprême !
Vous avez remarqué, dans
la lettre de Pierre ? !
« J'exhorte les
anciens parmi vous… : Paissez le troupeau de Dieu qui vous est
confié, en veillant sur lui non par contrainte, mais de bon gré,
selon Dieu ; non par cupidité, mais par dévouement. »
D’abord on
retrouve le thème du mauvais berger, le mercenaire…
Mais surtout Pierre
réintroduit les
bergers au pluriel, les personnes qui prennent des responsabilités,
au nom de l'ensemble de la communauté. Parce qu’il faut bien
s’organiser! Parce qu’il faut bien trouver une parole commune,
se mettre d’accord sur des projets communs. On est passé d’un
certain idéalisme communautaire à une mise en place concrète.
Pierre ne nomme pas
les bergers, mais il parle de la responsabilité elle-même : faire
paître le troupeau de Dieu. Et il relie cette responsabilité aux
anciens,
les presbytres.
Les anciens : à la
fois un statut (âge) et une fonction. En quoi consistait-t-elle
exactement ? Apparemment c'était différent d'une communauté à une
autre !
Mais ce qui apparaît
déjà clairement, à entendre toutes ces recommandations, c'est que
ce rôle était dès le début à la fois indispensable et délicat.
« N’exercez
pas un pouvoir autoritaire, mais devenez les modèles du troupeau ! »
Si personne ne
s'occupe de rassembler la communauté, elle s'éparpille … et elle
a mille bonnes raisons de le faire, aujourd'hui plus qu’à
n'importe quelle autre époque !
Mais sitôt que
quelqu'un s'y attelle, il y a des frictions et des risques de prise
de pouvoir.
C'est presque rassurant de
se dire que chez les tout premiers chrétiens, c'était déjà comme
ça !
Pourtant, Pierre
encourage ces responsables, et aujourd'hui encore, il faut encourager
tous ceux qui jouent ce rôle de berger, de rassembleur. Il faut les
encourager à tous les niveaux, en commençant par notre communauté
locale. Je pense à ceux qui ont des responsabilités instituées, le
conseil de paroisse, la diacre, l’assistance sociale, la catéchète
et son équipe, le sacristain, le pasteur, la stagiaire… mais aussi
à tous ceux qui aident à rassembler sans avoir une fonction
reconnue. Tous les bénévoles qui s'engagent pour une communauté
vivante.
Même si le mot
pasteur
signifie berger,
les pasteurs n’ont pas le monopole du rôle de rassembleur! Ce rôle
vous appartient à tous, même si vous pensiez être simplement venus
ce matin entendre quelque chose qui vous fait du bien, passer un
moment en bonne compagnie… Chacun pour sa part, vous contribuez à
ce que nous soyons une communauté qui fait envie, parce qu’elle
est en cohérence avec ce qu’elle croit !
Les mots de Pierre
vous paraissent peut-être difficiles. Aujourd'hui, on n’aime pas
vraiment être traité de troupeau !
Les mots ont changé de poids, alors parlons plutôt de communauté !
Les mots ont changé de poids, alors parlons plutôt de communauté !
L’apôtre parle
d’être « soumis aux anciens »… Aujourd’hui on
dirait plutôt : « Jouez le jeu, participez ! »,
mais aussi « laissez chacun prendre sa part de responsabilité », «
reconnaissez le rôle de chacun ! »
Un berger, un troupeau. Un
berger, des brebis qui se prennent en charge. Un berger, des
bergers !
L’enfant écoute
l’histoire du loup. Elle finit toujours comme ça, qu’il s’en
va penaud, parce que l’amour a été plus fort. Et l’enfant s’en
réjouit.
Amen
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