Attentats à Paris, émotion mondiale |
Attentats à Paris, émotion mondiale |
Lecture: | Hébreux 10,9-18 |
Chers Amis,
En entendant ce passage, on
sent bien qu'il a été écrit dans un autre temps,
un temps où la vie des gens était peuplée de
rites qui n'ont plus cours aujourd'hui.
Ainsi, ces prêtres du
temple de Jérusalem, qui offraient tous les jours des
sacrifices pour expier les péchés des gens. Le texte en
parle comme d'une réalité normale, celle qu'a aussi
connue Jésus quelques années plus tôt.
Mais celle que connaissent
aussi les
Grecs et les Romains… à la différence que les
Grecs et les Romains avaient de nombreux dieux à qui faire des
sacrifices, pour un peu tous les domaines de la vie, alors que les
Juifs n'ont qu'un seul Dieu… et en plus invisible… et
qui ne doit être représenté par aucune statue.
À part cette différence,
à l'époque c'est un peu tout le monde qui est occupé
par ce souci de faire faire des sacrifices expiatoires, pour rester
en bons termes avec le monde divin, et en particulier pour obtenir
d'être libéré de ce qui pèse, de la
mauvaise conscience, de l'inquiétude.
Comme ce temps paraît
lointain! Et l'idée même de sacrifices sanglants nous
paraît si étrange!
Dans la religion juive, le
Temple de Jérusalem a été détruit en 70
après J.-C. par les Romains, et depuis lors, cette sorte de
sacrifices n'a jamais été réintroduite.
Visiblement, l'auteur de notre
passage l’a écrit avant
la destruction du Temple. Mais pour lui, ces sacrifices n'ont déjà
plus de sens, à cause de la mort et de la résurrection
de Jésus-Christ.
Quant à la religion
gréco-romaine, avec ses dieux et ses sacrifices, elle a
survécu pendant encore trois siècles, puis elle a aussi
disparu, pour être remplacée par la chrétienté.
Alors pourquoi lire un passage
qui parle d'une réalité périmée depuis
bien longtemps? Aujourd’hui, chez nous, plus personne ne parle
de sacrifice. Même l'idée de la mort du Christ,
présentée comme un sacrifice paraît pour beaucoup
de gens un peu incongrue.
Bon, les sacrifices rituels
d'animaux dans un but expiatoire ont disparu de la vie religieuse…
mais la notion de sacrifice expiatoire…
a-t-elle vraiment disparu?
Bien sûr, on pense tout
de suite aux attentats suicides de vendredi, et l’on réalise
avec effroi que dans la nébuleuse islamiste, cette idée
de sacrifice est devenue absolument centrale, mais d’une
manière horriblement déformée. Les terroristes
sont persuadés d’une part de sacrifier leurs cibles et
de leur faire ainsi expier ce qu’ils considèrent comme
leurs péchés (d’où le côté
symbolique d’attaquer un lieu comme un cabaret), et d’autre
part de s’offrir eux-mêmes en sacrifice, expiant du coup
leur propre faute. Et ces sacrifices sont offerts à un dieu
terrible, qui n’a plus rien à voir avec le Dieu des
Juifs et des Chrétiens, ni même avec Allah le
miséricordieux, tel que le Coran nous le présente.
Mais qu’en est-il du
sacrifice expiatoire dans notre culture occidentale ? Pour ma
part, je le trouve très présent dans notre société
postmoderne ou postchrétienne, notre société si
sûre d'avoir dépassé tous ces archaïsmes…
Tous les soirs à 19h30,
on peut voir à la télévision une sorte de grand
prêtre des temps modernes, dans un rituel presque immuable,
nous amener des nouvelles du monde. Il rassemble et résume
tout ce qui s'est passé dans la journée, en particulier
tout ce qui s'est mal passé.
Et quel est le but de ce rituel?
Nous informer? Mais pourquoi faire? De la plupart des nouvelles,
nous ne pouvons que prendre note et nous émouvoir, et
déplorer…
Pourquoi faut-il ainsi
rassembler ce qui nous pèse, ce qui nous inquiète
pourquoi faut-il le nommer, sinon pour essayer en quelque sorte de
prendre le dessus?! Pour se convaincre qu'on est plus fort que le
mal qui est montré?!
Nous convoquons ainsi le mal pour
mieux le renvoyer là d'où il vient, si possible très
loin ! C'est bien une sorte de rite expiatoire!
Le grand prêtre du
téléjournal ne sacrifie pas d'animaux. Mais le rite
vise le même but : désigner le mal, le péché,
et nous en libérer. À la fin, les téléspectateurs
reçoivent la bénédiction : «Je vous
souhaite une bonne soirée». Et ensuite on passe à
un autre rite dont on pourrait aussi parler un jour: la météo…
Or ce que dit l'épître
aux Hébreux, c'est justement que le rite expiatoire échoue
dans son but-même. Le sacrifice, même répété
tous les jours, reste à jamais incapable d'enlever le mal.
Il produit même l'effet
contraire: il nous rend encore plus captifs de nous-mêmes. Il
renforce notre peur, tout en nous détachant des réalités
qu'il nous montre. Il nous endurcit: «Quelle chance que je ne
sois pas comme ce que le téléjournal nous montre!
Quelle chance que je ressemble plus au présentateur tiré
à quatre épingles, ou à la présentatrice
toute d'élégance vêtue, qu'aux pauvres victimes
qui m'ont été montrées!».
Le grand, le terrible paradoxe,
c’est que le terrorisme ne fonctionne que par la rencontre de
ces deux cultures du sacrifice, celle de l’islamisme
extrémiste, et celle du « grand-prêtre »
du journal télévisé. C’est notre propre
addiction à l’information immédiate et globale
qui rend efficace l’action terroriste, en la relayant à
l’infini.
Car l’action terroriste
ne fait que des dizaines, au plus des centaines de morts, alors que
la guerre, celle en Syrie par exemple, en fait des centaines de
milliers, voire des millions.
L’épître aux
Hébreux nous dit que tous ces rites expiatoires sont
incapables d’enlever le mal qu’ils prétendent
combattre. Aussi bien ceux du passé que ceux du présent,
ceux des extrémistes que les nôtres.
Mais en même temps, elle nous
parle du Christ, comme celui qui a établi un nouvel ordre en
accomplissant lui-même ce que les sacrifices ne pouvaient pas
atteindre.
Elle nous montre comment ce que
Jésus-Christ a accompli, à la fois ressemble aux
sacrifices expiatoires, et en même temps s’en différencie
complètement.
Là, j'aimerais dire quelque
chose qui me paraît très important.
Ce que Jésus a fait
dépasse ce que nous pouvons en dire. Ce qui est premier, c'est
l'étonnement des disciples face à leur expérience
de la Résurrection. Ce qui vient ensuite, c'est la tentative
de dire cette expérience et ce qu'elle signifie. Le Nouveau
Testament nous donne de nombreuses traces de cet effort de dire
l'indicible, avec des langages parfois très différents,
mais toujours la conviction que ce qui s'est passé là a
un caractère unique et
irrévocable. Autrement dit, il y
a un avant et un après. La croix et la résurrection ont
changé quelque chose. Elles l’ont changé pour
toujours.
Et nous devons continuer
aujourd'hui à chercher des mots pour dire le sens de ce qui
s'est passé, d'une manière qui puisse être
comprise par les gens de notre temps. Nous sommes des interprètes
de la résurrection, comme l'ont été les premiers
chrétiens. Leur témoignage nous inspire, mais c'est à
nous de trouver des mots compréhensibles pour aujourd'hui.
L'auteur de l'épître
aux Hébreux utilise l'image du sacrifice dans le Temple, pour
montrer que Jésus-Christ à lui non pas joué
ce sacrifice, comme le faisaient les prêtres tous les jours,
mais qu'il la vécu en lui-même,
qu'il a accompli le sens de ce sacrifice, une fois pour toutes. Et le
sens de ce sacrifice réside dans la façon de Jésus
de vivre l’amour de Dieu, jusqu’à l’extrême.
Par son don de lui-même,
qui est en même temps don de Dieu, il nous a libérés
de l'angoisse du pardon, en nous offrant ce pardon de façon
définitive. Ce n'est plus à nous de porter la charge du
mal, la nôtre, et celle du monde. Le Christ l'a déjà
portée pour nous!
Nous n'avons rien à
expier! Nous pouvons vivre de la
grâce, vivre dans la gratuité et la générosité,
avec la promesse que l'accomplissement du projet créateur de
Dieu est dans sa main.
Personne ne nous oblige à
nous associer aux rituels culpabilisants du téléjournal.
Personne ne nous fait devoir de porter le poids de la souffrance du
monde, surtout pas si c'est pour nous blinder au point que nous
n’arrivions plus à voir la souffrance du prochain qui se
tient à notre porte!
De spectateurs impuissants et
culpabilisés, nous pouvons devenir les bâtisseurs d'un
monde différent, dont le Christ est l'architecte et dont la
mesure est l'amour du prochain.
Le travail commence ici, chez nous.
Ce n'est pas un combat désespéré, car le mal est
déjà vaincu! C'est la construction patiente d'un
édifice que dans l'espérance, nous voyons déjà!
Amen
Olivier
Schopfer
Introduction à la prière
d’intercession
On aurait tort de conclure que
comme chrétiens, nous devrions cesser de nous intéresser
à l’actualité. Bien au contraire ! Mais nous
devons nous y intéresser dans un esprit différent, un
esprit de confiance en Dieu. Un esprit qui sait prendre distance, qui
mesure que les nouvelles que nous recevons ne représentent
souvent qu’un aspect des choses.
C’est tout le sens de la
prière d’intercession : Nous exercer à
élargir notre regard, tout en apportant à Dieu à
la fois ce qui nous préoccupe et ce qui nous réjouit.
Que notre prière soit toujours
plus large !
Que notre prière
s’efforce de n’oublier personne!
Que notre émotion légitime pour la souffrance des proches
ne nous fasse pas ignorer celle des autres, de part le monde.
Que notre émotion légitime pour la souffrance des proches
ne nous fasse pas ignorer celle des autres, de part le monde.
Que notre prière dépasse
les frontières,
celles entre les pays, celles entre les cultures,
celles entre les convictions !
celles entre les pays, celles entre les cultures,
celles entre les convictions !
Que notre prière ait en
vue ton projet
d’une humanité réconciliée
avec elle-même
et avec toi.
d’une humanité réconciliée
avec elle-même
et avec toi.
Que notre prière tienne
bon dans la confiance que ce projet est d’actualité,
plus que jamais.
Qu’elle sache en reconnaître les germes d’amour, ici et ailleurs.
Et qu’elle les entoure de soins, dans l’attente de la plus belles des récoltes.
Qu’elle sache en reconnaître les germes d’amour, ici et ailleurs.
Et qu’elle les entoure de soins, dans l’attente de la plus belles des récoltes.
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